Monsieur le Président,

Chères et Chers Collègues,

Mon intervention ne portera pas directement sur la session que nous allons avoir, ni même sur nos rapports parfois tendus avec l’Etat mais je voulais associer notre assemblée au centenaire de la première guerre mondiale et profiter de ce temps de parole qui m’est donné pour rendre hommage, non seulement aux poilus, mais aussi aux femmes et aux soldats «des anciennes colonies », souvent oubliés par notre République.

L’ensemble des pertes humaines mondiales de la Première Guerre mondiale s’est élevé à près de  19 millions de morts : 10 millions de militaires et 9 millions de civils.

Avant toute chose, cette guerre est une saignée, une perte collective pour l’humanité.

Partout dans le monde, les femmes ont joué un rôle déterminant durant ce conflit. En France, après le départ des hommes au front, elles les ont remplacés à l’arrière.

Dès le 6 aout 1914, à l’appel de Viviani, plus de 3 Millions de femmes d’exploitants vont ainsi « remplacer sur le champ du travail ceux qui sont sur les champs de bataille ». Elles deviennent « les gardiennes » des terres et des champs d’abord. Pour soutenir le moral des soldats, elles vont ensuite jouer le rôle de « Marraine ». Enfin, plus de 100 000 d’entre elles vont devenir des « anges blancs », des infirmières, quand elles ne sont pas radiologues, comme Marie-Curie.

Plongées dans un univers violent et masculin, non préparées, elles paieront un lourd tribut. Plus de 10% des infirmières y laisseront leur vie.

Les femmes deviennent les piliers de l’effort de guerre et les 700 000 « Munitionnettes » comme le dit l’expression « enfilent des obus comme des perles » dans des conditions qui n’ont rien d’idyllique.

Joffre a déclaré que «  Si les femmes qui travaillent dans les usines s’arrêtaient 20 minutes, les Alliés perdraient la guerre ».

Pendant 4 ans, elles seront ainsi obusières, conductrices de tramways, cantonnières, agricultrices, maréchaux-ferrants, gardes champêtres, bouchères, infirmières et aussi institutrices dans les classes de garçons du primaire et du secondaire.

Quel que soit le domaine où elles sont employées, les conditions de travail des femmes sont très dures. En usine, elles sont souvent sous-payées avec des journées de travail très longues. Dans les campagnes, elles s’épuisent à faucher, rentrer les foins, moissonner.

Dès novembre 1918, les femmes seront invitées à rentrer chez elles, à quitter l’industrie, mais si le retour n’est pas aisé pour les Poilus, les Gueules cassées, les traumatisés de la guerre, il n’est pas plus facile pour leurs femmes et pour les veuves. Le retour à la paix n’est pas évident, pas si rapide et la République pas toujours reconnaissante.

Si une journaliste de l’époque déclare « qu’il a fallu la Grande Guerre pour que l’humanité prît conscience de sa moitié », toutes les femmes, selon les Pays, n’ont pourtant pas obtenu les mêmes droits.

Les Danoises, les Allemandes, les Autrichiennes, les Anglaises, les Russes, les Polonaises, les Hollandaises, les Suédoises, les Belges, les Canadiennes, les Américaines ont obtenu le droit « d’être citoyenne, pas les Françaises ».

Le retour à la paix ne fut pas non plus évident pour nombre de combattants venus des ex-colonies.

Oui, la Nation a eu besoin de tout le monde et il est bon, aujourd’hui encore, de s’en rappeler.

A l’heure où l’on parle de Mineur Isolé Etranger, d’immigration, de bateaux en recherche de port d’attache…Souvenons-nous des 430 000 soldats venus de toutes les colonies de l’Afrique à l’Asie du Sud–Est. Souvenons-nous qu’ils ont pris part à une guerre qui aurait pu ne pas être la leur.

En première ligne de la bataille de la Marne, on trouvait des Maliens. En première ligne du Chemin des Dames, on trouvait des tirailleurs Marocains et Sénégalais, des zouaves Algériens.

Il ne faut pas oublier non plus que des soldats issus de ces pays se sont aussi battus pour le compte des puissances coloniales (Française, Belge, Anglaise, mais aussi Allemande…) sur d’autres continents, notamment en Afrique.

En France, on les trouvait dans les tranchées mais ils étaient aussi présents à l’arrière. C’est ainsi que plus de 100 000 Algériens et 40 000 Marocains ont été envoyés en métropole, mais aussi quelquefois dans les campagnes, afin de remplacer la main-d’œuvre masculine partie au front.

A la fin de la guerre, le retour dans leurs pays, dans leurs villages ne fut pas toujours évident. Convaincus de la reconnaissance claire, pleine et entière, de leur citoyenneté, payée par l’impôt du sang versé, beaucoup d’entre eux furent déçus.

Rama YADE secrétaire d’État aux Affaires étrangères et aux Droits de l’Homme déclarait en novembre 2008 que « Nous sommes nombreux à avoir en tête l’image de ces vieux tirailleurs africains qui ont vécu longtemps sans rien demander. Oui, ils avaient subi l’injustice. Oui, ils avaient payé le prix du sang sans en être remerciés. Mais combien d’entre eux ont traîné leur silhouette dans les villes et villages africains, dignes, ne revendiquant rien, étant simplement fiers d’avoir servi un pays qu’ils n’ont cessé d’appeler la mère patrie ».

Oui, la grande guerre laissera des traces partout dans le monde. Les Américains, les Anglais, les Russes mais aussi les Canadiens, les Australiens, les Néo-Zélandais, les Grecs, les Portugais, les Chinois. Tous sont venus de loin pour mourir sur le sol de France.

Commémorer la première guerre mondiale, c’est donc se souvenir de toutes ces vies arrachées partout dans le monde mais c’est aussi et surtout avoir un message de paix. Le centenaire n’a pas vocation à exhumer les combats d’hier mais à nous réunir, à nous rassembler dans la même évocation.

Aujourd’hui nous ne commémorons pas la victoire de 1918, mais la fin de ce conflit.

Malgré la naissance d’un droit international et la mise en place du Haut-commissariat pour les réfugiés ou de la société des Nations par le Président Américain Wilson, on le sait «  la der des ders » ne sera pas la  dernière.

Clemenceau avait raison : « Il est plus facile de faire la guerre que la paix. »

Construisons une Europe plus forte d’abord mais regardons aussi par-delà notre continent.

Pensons qu’en plein conflit, à Noël 1914, sur le front, des soldats ennemis Français et Allemands ont cessé le feu et fraternisé, le temps des fêtes.

Alors; faisons honneur à tous ces soldats allemands et français de Noël 1914 qui ont dépassé leurs peurs de mourir pour aller l’un vers l’autre.

Oui, nous le devons à tous ces combattants, ses poilus et ses 19 Millions de morts pour que vive partout la devise de notre République « La Liberté, l’égalité et la fraternité » entre nos nations.

Je vous remercie pour votre attention.

Christophe MARTINS

Président du Groupe Radical au Conseil Départemental 35

 

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