En ouverture de la session du Conseil général, qui se tenait les 27 et 28 septembre 2012, Christophe Martins (vice-président du Conseil général et maire PRG d’Iffendic) a tenu un discours rappelant que les principes républicains sont d’actualité, particulièrement à une période où les communautarismes et les extrémismes sont exacerbés.
Monsieur le Président,
Mes chers Collègues,
Madame Lequertier, à qui je souhaite la bienvenue au sein de cette Assemblée,
Mesdames, Messieurs,
Chaque jour, la crise fait de nouveaux dégâts. Certains pensent toujours qu’elle est passagère. Nous avons, nous, une autre vision des choses. Nous pensons que cette crise, certes économique et sociale mais aussi environnementale et peut-être demain militaire, est durable.
Les aspects les plus visibles (spéculations financières autour des dettes souveraines, instabilité au sein de la zone euro) doivent trouver leur solution dans un renforcement de type fédéral de l’Union Européenne.
Un premier pas vient d’être fait avec la validation par la Cour suprême allemande, des mécanismes européens de sécurité, acceptant la solidarité.
Mais ce volet de la crise ne doit pas dissimuler d’autres aspects, plus structurels.
- La mondialisation – qu’on n’arrêtera pas par de simples incantations – induit une nouvelle division internationale du travail qui n’est pas favorable aux pays développés.
- Le travail lui-même, considéré, à tort ou à raison, comme une valeur structurante de nos sociétés, tendra à se raréfier.
- La disponibilité des matières premières agricoles et minières et des énergies traditionnelles, qui paraissait illimité, appartient au passé.
Ces tendances nouvelles et de long terme se traduisent par l’émergence de puissances économiques inconnues et, pour certaines, insoupçonnées. Elles se traduisent également par de fortes tensions internationales pouvant déboucher, comme on le voit avec le pétrole soudanais ou le nucléaire iranien, et demain, aussi, avec l’eau, sur des affrontements militaires.
Selon les principes de Schumpeter, nous avons toujours inscrit notre action économique dans des cycles où le progrès scientifique et technique et les innovations, fournissaient un horizon sans cesse repoussé.
Or, il nous faut constater – ce qui ne signifie pas s’en accommoder – que, sur ce point là aussi, nous sommes en panne de progrès.
C’est bien dans cet environnement nouveau que doit s’inscrire notre action, y compris départementale. Il ne sert à rien d’entretenir certaines illusions :
- Faudrait-il renoncer à la construction européenne car elle est, par définition, toujours insatisfaisante ?
- Faudrait-il renoncer à l’Euro car l’on pourrait seul au monde dévaluer ?
- Faudrait-il crier halte à la mondialisation, comme si nous avions le pouvoir de le faire, et refermer nos frontières ?
- Suffirait-il de faire payer les riches au nom d’un égalitarisme puéril pour sauver nos finances publiques ?
Non, c’est se tromper que d’y croire, c’est tromper que d’y faire croire et c’est même dangereux, car cela divise une fois de plus notre société et entretient la montée du communautarisme.
De même il nous faut être vigilant quant aux mots employés à propos des entrepreneurs. La gauche moderne doit placer l’entreprise au cœur de sa réflexion économique et sociale.
Elle est le lieu de création et de partage des richesses, de convivialité et d’expression des valeurs humaines. Bien sur, il y a des chefs d’entreprises avec des comportements que l’on réprouve tous mais la plupart de nos artisans, de nos commerçants, de nos chefs d’entreprises, sont des acteurs respectueux, qui permettent à notre Pays de faire face à la crise.
Sur ce point, nous nous félicitons que le gouvernement ait décidé de maintenir les dispositifs ISF-PME et IR-PME essentiels pour le renforcement des fonds propres des entreprises. De même nous partageons le souhait du Président de la République de réformer le PEA et la fiscalité de l’épargne pour mieux orienter les capitaux vers les entreprises.
Il faut être très clair sur les analyses et les causes de la crise car, devant l’absence d’explications rationnelles, le risque est grand qu’une partie de nos concitoyens se réfugie dans des explications simplistes, voir populistes, relevant parfois même plus du surnaturel que d’un rationalisme scientifique.
Au pays de Voltaire, le projet républicain est trop souvent mis à mal. Il y est même des endroits où il est désormais interdit de ne pas croire.
Dans une République apaisée, lorsque l’on n’est pas d’accord, on devrait pouvoir critiquer, démontrer, contre-argumenter, faire entendre nos voix mais en aucun cas brûler, piller, ou faire acte de violence.
On nous dit qu’il faut excuser la violence de certains « extrémistes » religieux, car ils se sont sentis blessés au plus profond de leur être. Oui, peut être, certainement même…Mais les horreurs proférées par certains croyants sur les non-croyants, sur les homosexuels, sur les femmes qui avortent, justifieraient aussi, dans bien des cas, autant de violences.
Et pourtant, soyons clair, l’Islam n’est pas un problème en soi. L’Islam est une religion qui s’ajoute aux autres religions qui constituent aujourd’hui la mosaïque culturelle de notre Europe.
Les menaces que nous connaissons aujourd’hui sont plus manifestes au niveau de l’Islam, mais il n’est pas exclu que l’intégrisme et aussi les fondamentalistes puissent se manifester du côté du christianisme, du côté du judaïsme, ou de toute nouvelle religion.
Si nous croyons dans le projet européen, c’est parce que c’est justement le cadre géographique, culturel et politique, où le croisement des histoires et des civilisations nous permet de nous extirper de cet enfermement.
La société n’a pas besoin d’une nouvelle guerre de religions. Elle a plutôt besoin de s’ouvrir et de réaffirmer ses principes et ses valeurs de respect des différences, d’ouverture, de dialogue, pour que chacun puisse s’épanouir, quels que soient ses choix individuels, pour que chacun puisse tirer profit au mieux de notre République et l’enrichir.
Et sur ce point, Monsieur le Président, je réitère notre proposition de mettre en place un observatoire de la laïcité en Ille-et-Vilaine.
De même, nous nous félicitons de la décision de Vincent Peillon d’installer une mission sur la « morale laïque » à l’Ecole.
L’Ecole doit, en effet, retrouver les moyens intellectuels d’une instruction républicaine des esprits. Cela passe autant par la formation des enseignants que par la définition précise d’une « morale laïque » pour le XXIe siècle, capable, comme le souhaite le ministre de l’éducation nationale, de « reconstruire entre les enfants de France du commun ».
Il s’agit aussi de redonner vigueur à l’idée que la citoyenneté républicaine n’a rien d’ethnique ou de religieux, mais qu’elle est basée sur les principes de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 et accessible à tous ceux et toutes celles qui sont désireux de s’intégrer à ce projet.
Permettez-moi, Monsieur le Président, en cette période de rentrée scolaire, de souhaiter à tous nos collégiens et aux corps enseignants, une bonne année scolaire.
Le Département agit pour leurs donner les moyens de leur autonomie pédagogique et éducative. Pour cette année scolaire 2013, pour les 51 642 collégiens, c’est près de 14 Millions d’euros d’aides au fonctionnement qui vont être votées pour nos établissements, soit 272 euros par élève.
Mais l’effort du Conseil général ne s’arrête pas là : le Plan pluriannuel d’investissement continue de se dérouler pour nos collèges. Pour cette année et pour 2013, outre d’importants travaux de réhabilitations très attendus sur Dinard et sur Tinténiac, nous verrons la construction du Collège de Crévin.
Un budget d’investissement de près de 12 M€ devrait pouvoir être engagé ce qui, en cette période de crise, montre bien les choix prioritaires de notre majorité.
L’éducation, l’enfance, avec l’élaboration d’un nouveau schéma de protection de l’enfance, ou, encore, notre volonté d’accompagner au plus prés de chez eux les enfants les plus en difficultés (notamment en créant un nouvel établissement sur Redon), montrent que nous croyons en l’avenir de nos plus jeunes citoyens et œuvrons pour leur épanouissement.
Sur tous ces points, notre groupe tenait à féliciter Mireille Massot, vice-présidente, pour son travail, son investissement, son implication. Malgré un contexte budgétaire des plus noirs, vous avez su œuvrer pour que, cette année encore, la rentrée scolaire se passe dans de très bonnes conditions. Vous avez su également, à travers les multiples réunions organisées autour des cartes scolaires, vous interroger et jeter les bases des futures rentrées scolaires. Par le dialogue, la discussion, l’échange, vous avez su mettre en place une méthode qui privilégie la recherche de solutions partagées à la confrontation.
Le Département est d’ailleurs bien souvent un cadre intéressant pour travailler en profondeur sur nombre de champs d’actions.
Longtemps suspecté d’avoir grossi le « millefeuille » des échelons de l’action publique, le Département semble bénéficier d’un retour en grâce, la ministre de la Réforme de l’Etat et de la décentralisation, Marylise Lebranchu, s’étant déclarée « résolue à consolider les départements, y compris à lui redonner une autonomie financière ».
Comme le dit l’une de nos Collègues du Conseil Général « cela va dans le bon sens ».
Et il est plus que temps car, comme la motion de l’Association des Départements de France réunie dernièrement en congrès le dit dans une résolution votée à l’unanimité, « le mode actuel de financement des allocations de solidarité versées par le département n’est « pas acceptable », les départements assurant par exemple aujourd’hui près de 80% du coût de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA), au lieu du moitié-moitié au départ ».
Pour Madame la Ministre le département est « porteur d’investissements et d’équipements nouveaux » comme « la couverture numérique du territoire », dossier que nous retrouverons d’ailleurs pendant cette session.
Permettez-moi, sur ce dernier point, de regretter que l’abandon du service universel en matière d’internet nous conduise aujourd’hui à construire des réseaux THD dans les zones les moins denses en population et donc les plus couteuses, laissant au privé l’initiative dans les zones urbaines, les moins couteuses. Relevant d’un certain bon sens, l’idée de confier aux opérateurs privés les principales agglomérations a malheureusement bloqué la péréquation nationale, si utile pour couvrir l’ensemble du territoire.
Encore faut-il reconnaitre qu’avec les orientations du SCORAN de la Région Bretagne et du SDAN d’Ille-et-Vilaine, qu’une réelle mutualisation financière infra-régionale est opérée.
Le département est donc un lieu où l’on peut encore créer les conditions de l’égalité des territoires en défendant un mode de développement équilibré entre territoires ruraux et urbains, respectueux des nouvelles ruralités.
Le département est aussi le lieu de concertation : Bon nombre d’acteurs de l’éducation, du monde culturel, de la santé, des usagers de la route, des acteurs privés, des acteurs publics s’y retrouvent pour y élaborer des actions et des stratégies communes.
La charte pour une gestion économe du foncier en Bretagne et sa déclinaison par département pourraient en être l’illustration.
Mais, sur ce point, nous sommes pourtant plus que dubitatifs…pas sur la méthode, encore que s’assurer du soutien des élus locaux en bout de course, une fois la charte rédigée ne soit pas forcément la meilleure façon de faire.
Les grands principes s’inscrivent, certes, dans le Grenelle de l’Environnement auquel nous adhérons pleinement. De même nous souscrivons pleinement à l’idée qu’il nous faut anticiper le fait d’être demain 9 milliards d’habitants et de préserver nos terres agricoles.
Mais, renouvellement urbain et densification sont œuvre de longue haleine, qui induisent des procédures et des coûts non négligeables. Interdire toute extension de l’urbanisation avant mise en œuvre de densification relève de l’utopie, pour bon nombre de communes rurales.
Nous redoutons de voir les services de l’Etat ou les consulaires opposer ce document aux communes, lors des révisions de PLU et, par conséquent, de voir le développement de l’habitat dans certaines communes se figer pour bon nombre d’années.
Les maires, notamment en matière d’urbanisme, voient s’empiler d’année en année, de mois en mois, de jours en jours, de nouvelles législations, réglementations, recommandations et maintenant des chartes ou des charrettes de mesures. Celles-ci, petit à petit, rognent leur capacité à penser leur territoire « librement » Or nous, nous faisons avant tout confiance à la sagesse des élus municipaux et notamment à l’Association des Maires d’Ille-et-Vilaine (A.M.I.V), elle aussi à priori peu enclin à signer cette charte.
C’est pourquoi, Monsieur le Président, le Groupe Radical, Social, Démocrate et Républicain, vous demande le report de cette question à l’ordre du jour.
La commune, comme le Conseil général, reste attachée à sa clause de compétence générale et à son pouvoir de s’administrer librement.
Élus, communaux ou du Conseil général, nous ne voulons pas être condamnés à regarder se vider notre département. Nous voulons agir. Nous voulons participer à son développement, à la recherche d’un nouveau mode de croissance.
Nouveau mode de croissance, comme vous nous le proposez pendant cette session, avec notre inscription dans le programme européen INTERREG IVA France-Manche Angleterre, programme dont l’une des déclinaisons pourrait être d’approvisionner par des circuits cours alimentaires nos services de restaurations collectives comme ceux des collèges.
Oui, nous devons être inventifs, innovants, car, qu’il s’agisse de la crise avicole ou de la crise automobile (et nous adressons notre soutien aux salariés et ouvriers qui vivent dans l’angoisse), nous voulons prendre part au maintien, mais aussi au développement de l’emploi sur notre département.
Ce développement, nous le voulons durable et respectueux des valeurs que nous défendons.
C’est Pourquoi, Monsieur le Président, vous pouvez compter sur l’entier soutien du Groupe Radical Social Démocrate et Républicain.
Je vous remercie pour votre attention.