Conseil général d'Ille-et-Vilaine

Conseil général d'Ille-et-Vilaine

Discours de session du Conseil général de juin 2012, prononcé par Christophe Martins (vice-président du Conseil général, président du groupe Radical, Social, Démocrate et Républicain).

Monsieur le Président,
Mes Cher(es) Collègues,
Mesdames, Messieurs,

« Serions-nous plus libres sans État ? »

Ce sujet de philosophie du bac 2012, est un très bon sujet pour tous les nouveaux députés, car ce sujet d’actualité invite à explorer toutes les questions qui se trouvent au cœur de la citoyenneté.

Nous sommes tous d’accord, aucune société ne peut se passer de lois, de gouvernement, mais nous constatons aussi que l’État lui-même comporte depuis des millénaires des risques de domination, d’oppressions, de dérives contraires aux libertés individuelles.

Dès lors, si l’on accepte l’idée que l’État ne menace la liberté que si nous ne la protégeons pas, il nous faut, nous aussi, dans notre rôle d’élu, être à la fois obéissant et résistant. Ces « deux vertus du citoyen » comme les appelait Alain, sont la garantie de l’ordre mais aussi de la liberté en ne soumettant pas aveuglement à l’Etat.

Cela a toujours été une ligne de conduite pour les membres de notre groupe, cela s’appelle la liberté de pensée. C’est d’ailleurs ce qui enrichit notre démocratie.

Permettez-moi, dès lors, de remercier tous les candidats qui, au cours des primaires, de l’élection présidentielle et des élections législatives, ont permis d’animer, d’alimenter le débat démocratique et par conséquent notre démocratie.

Permettez-moi aussi de me réjouir de l’élection de François Hollande, hier candidat PS-PRG pour la présidentielle et aujourd’hui président de la République.

Permettez-moi encore de me réjouir de la nomination de deux Radicaux de Gauche : Christiane Taubira, au ministère de la justice et Sylvia Pinel, ministre déléguée, chargée de l’artisanat, du commerce et du tourisme.

Enfin, je salue la campagne législative de mon ami Michel Penhouët sur Saint-Malo.

Et au nom du groupe RSDR, j’adresse toutes mes félicitations républicaines aux députés reconduits, Thierry Benoit et Marcel Rogemont, mais aussi aux nouveaux députés François André, Gilles Lurton et Isabelle Le Callennec.

Les élections ont été placées sous le signe du changement, changement de personnel politique, changement d’images, changement dans les orientations prises par l’ancienne majorité.

Nous devons maintenant nous mettre au travail tant il est vrai que nous sommes dans une situation peu enviable.

A l’extérieur de notre Pays, quand ce n’est pas l’horreur comme en Syrie, c’est l’incertitude qui gagne en Afrique, comme au Moyen-Orient.

Le printemps Arabe est en train de virer à l’été islamiste, comme en Tunisie, ou en dictature militaire, comme en Egypte.

En Europe, Mario Monti, le président du Conseil italien, parle de « situation très, très grave ». L’angoisse et la peur de la misère se sont installées en Grèce et gagnent progressivement l’Espagne, le Portugal, l’Italie, demain la France.

Je ne peux d’ailleurs m’empêcher de corréler la situation économique désastreuse de notre continent avec les résultats électoraux des extrêmes en Europe.

Rappelons toutefois à nos populations que, dans l’histoire, jamais aucun peuple, aucun pays, n’est ressorti indemne de ces expériences.

Nous devons en Europe, en France, redresser les comptes de la Nation, redresser nos finances publiques. Cela ne se fera pas sans mal, mais constituera un atout pour l’avenir.

Aujourd’hui, chaque euro dépensé pour payer les intérêts de la dette est une perte d’argent. Il ne peut être investi ni dans la recherche, ni dans l’éducation, ni dans l’innovation…

Nous devons également renforcer notre économie pour l’avenir.

Aucune sortie de crise n’est envisageable sans croissance. Notre stratégie doit donc viser à exploiter le potentiel de croissance de l’Europe.

C’est pourquoi nous appelons, une fois de plus, à toujours plus d’Europe, à une Europe fédérale, à une Europe protectrice, à une Europe ambitieuse et ouverte, à une Europe libérée du carcan bancaire…

Nous le savons, nous, élus, avons peu de leviers pour relancer nos exportations, peu de leviers pour agir sur la consommation ou sur l’investissement privé. Mais nous pouvons participer à la mise en place des conditions qui accompagneront, faciliteront ce redécollage.

S’il est vrai que nous devons « nationalement » réduire notre dette, il faut permettre aux départements « localement » de maintenir un haut niveau d’investissement, investissements qui participent activement à cette recherche de relance économique.

La construction de la LGV avec notre participation financière, nos investissements routiers, la construction d’un nouveau collège à Crevin ne sont pas que des illustrations, des images. Non, ce sont des travaux, des infrastructures qui permettent à nombre de nos habitants de conserver ou de trouver un emploi.

Il faut rappeler que la dépense publique est réalisée par l’investissement à hauteur de 75 %, par les collectivités publiques.

Or, en ce début d’année, les départements ont trouvé à peine 35 % des crédits bancaires demandés.

Selon l’enquête de l’Assemblée des Départements de France (ADF), en moyenne, début 2012, les banques ont proposé de prêter aux départements 35 % de la somme qu’ils demandaient au titre des emprunts à long terme. Le taux était de 49 % l’an passé.

Pénurie de crédit oblige, la réduction des investissements va sans doute se généraliser à l’ensemble des communes et aux régions, alors que, jusqu’à présent, le phénomène touchait surtout les départements.

Selon Patrick Bernasconi, président de la Fédération nationale des travaux publics, les collectivités locales représentent la moitié du chiffre d’affaires des entreprises de travaux publics. Des milliers d’emplois sont donc en jeu.

La nécessité de création d’une banque pour les collectivités se fait sentir, tout comme le besoin de solder une fois pour toute l’aventure bancaire de DEXIA.

Heureusement, il y a trois ans, notre département a anticipé sur les conséquences de la crise en travaillant autour d’un budget primitif Zéro. Certes, en réinterrogeant toutes nos priorités et en serrant au plus juste nos dépenses de fonctionnement, nous n’avons pas fait que des heureux. Cela dit, les résultats sont là. Les efforts sont aujourd’hui traduits dans l’analyse du compte administratif qui va être soumis, lors de cette session, au vote de l’assemblée.

Celui-ci fait en effet apparaître :

  • une progression des recettes de fonctionnement en raison notamment du volume des droits de mutation encaissés,
  • une évolution particulièrement maitrisée des dépenses de fonctionnement, malgré la progression encore significative des dépenses du secteur social,
  • une épargne brute d’un montant de 141 millions d’euros augmentant notre capacité d’autofinancement et permettant ainsi de limiter le recours à l’emprunt,
  • une très nette amélioration de notre capacité de désendettement (3,6 années).

Ce constat traduit la bonne gestion financière de notre Département malgré une modification de la structure de ces recettes.

En effet, l’année 2011 a constitué la première année de pleine application de la réforme fiscale, ramenant la part de recette de fiscalité directe, en deux ans, de 45 à 17 % du total des recettes de fonctionnement.

Notre budget traduit nos priorités et je suis fier d’appartenir à une majorité qui, tout en maintenant l’un des plus hauts niveaux de soutien aux pratiques musicales, aura aussi fait ce choix courageux de réorienter ses crédits vers des actions destinées à des publics moins aisés.

Notre département est reconnu pour sa proximité avec les territoires avec lesquels nous contractualisons dans le cadre de la seconde génération de contrats départementaux de territoire.

Aide encore, en direction des communes traversées par la Ligne à Grande Vitesse, en mettant à leur disposition l’ingénierie de notre service infrastructure pour les accompagner dans les rétablissements des voies communales traversées.

Oui, Monsieur le Président, nous donnons un avis favorable à la constitution d’un grand pôle métropolitain «  Loire-Bretagne » permettant à Brest, Rennes, Angers, Nantes et Saint-Nazaire de coopérer et de peser à l’échelle Européenne. Mais nous le faisons car nous sommes persuadés que les départements, notre département, permettront, en toute complémentarité, de maintenir un équilibre, une meilleure répartition des richesses, des hommes et des activités sur nos territoires plus ruraux.

C’est la force et l’essence même du Département d’être un instrument de régulation et d’aménagement de notre territoire.

Une nouvelle étape de la décentralisation devra permettre de réaffirmer ce rôle de proximité et de mettre un terme à cet élu hybride de conseiller territorial.

Après trente ans de décentralisation, il nous faut collectivement écrire un nouvel acte. Et pourquoi ne pas mettre en place un comité de réflexion autour de cette nouvelle étape ?

Celui-ci devra garantir l’autonomie fiscale et financière nécessaire à l’exercice de nos compétences et une meilleure péréquation des ressources.

Cet esprit de justice, que l’on retrouve également dans la volonté nationale de réforme fiscale, guide d’ailleurs toute notre action : que l’on parle de schéma d’accueil de la petite enfance, comme pendant cette session, que l’on parle de politique d’animation sportive, ou, encore, que l’on parle d’un nouveau programme départemental d’insertion, c’est bien vers ceux qui en ont le plus besoin, que nous nous tournons.

C’est d’ailleurs ce qui justifie votre proposition d’amélioration des conditions de travail des assistants relais familiaux.

Concernant le domaine de la protection de l’enfance, j’ai, Monsieur le Président, une proposition d’évolution à vous faire.

Nous avons actuellement dans notre organisation, en Ille-et-Vilaine, un travailleur social référent basé dans le CDAS de rattachement de la famille de l’enfant placé et ce, quel que soit le type de placement de l’enfant : famille d’accueil, établissement ou placement à domicile.

Dans les faits, lorsque les enfants sont placés dans un établissement, ce dernier désigne aussi un référent. Nous nous trouvons donc, dans ce cas, avec deux référents pour un enfant.

Deux intervenants se retrouvent nommés pour une même finalité. Cette situation produit naturellement un déficit de complémentarité et, en situation d’urgence, un manque de réactivité. Pire encore, dans certains endroits, cela peut produire des tensions, voire des conflits inutiles entre les personnes et leurs institutions respectives.

De plus, au regard du nombre d’enfants placés en établissement, c’est un dispositif qui mobilise beaucoup de temps de travail des référents CDAS.

Aussi, je vous propose une piste de réflexion sur la nomination d’un seul référent, référent unique qui serait placé auprès de l’enfant, c’est-à-dire au sein des établissements.

Notre Département a donc toute sa place pour contribuer par la recherche de solutions novatrices à la construction d’un nouveau mode de développement.

– Nouveau mode de développement que nous voulons humaniste et innovant, comme les propositions d’évolution du dispositif d’accueil familial pour les personnes âgées et handicapées que vous nous proposez, pendant cette session.

– Nouveau mode de développement que nous voulons laïc, car il s’agit d’une condition essentielle au respect de l’exercice des croyances de tous mais aussi, plus largement, au respect des choix de chacun et de chacune.

La laïcité est d’ailleurs le meilleur rempart pour garantir la liberté de la femme. Il n’y a qu’à regarder certain pays qui, sous couvert de religion, font de la femme une demi-portion sans véritables droits.

La démocratie ne peut vivre sans le respect de l’autre et la laïcité est la meilleure arme pour défendre les libertés individuelles, comme collectives.

Très attachés à ces libertés, nous soutenons le principe de mise en œuvre de l’IVG médicamenteuse dans les centres de planification ou d’éducation familiale gérés par le Département.

Avant de conclure, j’ai l’honneur, Monsieur le Président, comme vous l’avez fait, d’accueillir au sein de notre groupe et de présenter, à l’ensemble de nos collègues Marie-Thérèse Auneau.

C’est une grande première, puisque pour la première fois dans la vie de ce groupe, nous nous enrichissons de la présence d’une femme. Eh oui, pour nous aussi « le changement c’est maintenant ».

Plus sérieusement, Maire de Saint-Aubin-du-Cormier, Marie-Thérèse Auneau était la suppléante de Jean Taillandier et siège donc aujourd’hui au sein de cette Assemblée, dans ses nouvelles fonctions de conseillère générale du canton de Saint-Aubin-du-Cormier.

Je sais qu’à l’instar de Jean, elle partage l’idéal républicain de justice, de liberté, d’équité et de laïcité qui est le notre.

Le Groupe Radical, Social, Démocrate et Républicain est animé par un esprit, celui de l’humanisme des Lumières.

Nous croyons en l’être humain et nous avons pour volonté de l’aider, de le replacer au centre de la vie sociale et de toutes les considérations.

Ayant commencé mon propos par un peu de philosophie, je conclurai mon propos en citant Jean-Paul Sartre :

« Un homme n’existe pas à la manière de l’arbre ou du caillou : il est engagé, il faut parier et l’abstention est un choix ».

C’est pour cela que nous sommes à vos cotés, Monsieur le Président. Nous préférons le choix de l’action à celui de l’abstention et c’est cette action que nous partageons au sein de votre majorité et que nous mettons à votre service.

Je vous remercie pour votre attention.

Christophe Martins

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